OpenAI lance le navigateur ChatGPT Atlas: un cauchemar pour la vie privée | Revue de presse n°29
J'ai sélectionné des nouvelles importantes sur l'intelligence artificielle pendant la semaine du 20 au 26 octobre 2025.
Bienvenue dans la 29ème revue de presse de Réalité artificielle. Je me suis focalisé cette semaine sur ChatGPT Atlas, sur Amazon qui prévoit de remplacer 600’000 emplois par des robots et sur les risques existentiels liés à la superintelligence artificielle. Bonne lecture!
📰 À lire
OpenAI lance le navigateur Atlas: un cauchemar pour la vie privée
L’entreprise propriétaire de ChatGPT a lancé mardi un nouveau navigateur web intitulé Atlas qui permet à l’agent conversationnel d’analyser et de mémoriser les sites internet visités par les utilisatrices et utilisateurs. Des experts soulignent les risques que cela pose en terme d’invasion de la vie privée, rapporte le Washington Post.
Atlas est pour l’instant disponible uniquement sur macOS. Il est basé sur le navigateur open-source Chromium, qui a été crée par Google en 2008. C’est ce code source qui sert de base aux navigateurs Google Chrome, Microsoft Edge ou Brave.
Ce qui différencie Atlas de ses concurrents est son intégration de ChatGPT au sein de la navigation internet. La page d’accueil est une fenêtre de discussion permettant de poser une question à ChatGPT ou d’accéder directement à un site. Avec cette fonctionnalité, Atlas change les fondamentaux de la navigation sur internet: au lieu d’écrire quelques mots dans un moteur de recherche comme Google ou DuckDuckGo pour obtenir des informations, les utilisateurs d’Atlas utiliseront principalement l’assistant conversationnel.
L’intégration de ChatGPT dans Atlas ne s’arrête pas là, elle est même omniprésente. En cliquant sur l’onglet «Demande à ChatGPT» en haut à droite, les usagers ouvrent alors le chatbot dans une barre latérale et peuvent lui demander de résumer la page internet actuellement consultée ou d’apporter des informations supplémentaires concernant la recherche en cours.
Dans une vidéo de lancement, OpenAI donne notamment l’exemple d’un internaute qui consulte une offre pour la location d’une maison de vacances et qui demande à ChatGPT s’il y a des bonnes randonnées à faire dans les environs.
Introducing ChatGPT Atlas (OpenAI)
En utilisant Atlas, il est également possible de demander à ChatGPT de rédiger ou modifier un e-mail directement dans le navigateur, sans devoir copier-coller le texte entre deux fenêtres séparées.
Enfin, le navigateur d’OpenAI intègre un agent qui peut par exemple réserver un hôtel ou faire des achats en ligne de façon autonome. Cette fonctionnalité est réservée aux comptes Plus (20 dollars par mois) et Pro (200 dollars par mois).
Le mode agent crée des vulnérabilités en terme de cybersécurité, avertit toutefois Fortune. Un type d’attaque informatique nommé «injection de prompt» permet en effet à des pirates informatiques de cacher des instructions pour ChatGPT sur des sites internet. Le chatbot peut alors ouvrir la boîte mail de l’utilisateur et envoyer tous les messages à un groupe criminel, par exemple.
Risques pour la vie privée
Atlas crée également de nouveaux risques pour la vie privée des internautes. Geoffrey A. Fowler, un chroniqueur technologique au Washington Post, prévient que ce navigateur «travaille en coulisses pour en apprendre bien plus sur vous».
Si on lui en donne la permission lors de l’installation (ce que la plupart des gens feront probablement), Atlas «construit un réservoir de souvenirs à propos des sites que vous visitez», indique Fowler. Et le navigateur ne mémorise pas seulement les adresses internet, mais également «des faits et des analyses» concernant les sites eux-mêmes. Ces mémoires, enregistrées dans les centres de données d’OpenAI, sont alors utilisées pour adapter les réponses de ChatGPT à chaque usager.
«Ce niveau de personnalisation amène des risques en terme de vie privée qui sont difficiles à comprendre, et encore moins à contrôler», avertit Fowler. «Il y a des choses que vous aimeriez qu’une IA mémorise et mentionne de nouveau à l’avenir - et des choses que vous n’aimeriez certainement pas, comme par exemple des difficultés relationnelles ou ce problème de santé embarrassant sur lequel vous avez fait des recherches à 2h du matin.»
Une affirmation contredite
OpenAI affirme qu’Atlas ne mémorise pas l’ensemble des pages internet visitées. Le navigateur n’est pas non plus censé enregistrer les documents d’identité, les numéros de comptes bancaires, les adresses, les mots de passe, les données médicales, les informations financières et les contenus de sites pour adultes.
Toutefois, un test mené par l’Electronic Frontier Foundation et cité dans le Washington Post a montré qu’Atlas a mémorisé des informations concernant une inscription à des services pour la santé sexuelle et reproductive via Planned Parenthood Direct, une plateforme de télémédecine. Le navigateur a également enregistré le nom d’un docteur. Selon Lena Cohen, la technologue qui a mené ce contrôle, «la collecte étendue de données dans le navigateur Atlas pourrait être un cauchemar pour la vie privée des utilisateurs».
«Avant, il y avait toujours une barrière assez visible entre ce qu’on donnait à ChatGPT et ce qu’était notre vie en dehors de ChatGPT», résume Fabien Suchanek, professeur à l’école d’ingénieurs Télécom Paris et spécialiste des enjeux de l’intelligence artificielle, dans un article de Libération. «Avec Atlas, cette barrière tombe. Même en ayant la possibilité de “switch-off” [désactiver la fonctionnalité], il y a toujours le risque que l’on partage plus que ce que l’on souhaite.»
Des conséquences sérieuses
«La surveillance en ligne peut avoir de sérieuses conséquences», alerte le Washington Post. «Est-ce que des gouvernements pourront demander à ChatGPT de leur fournir les informations de navigation des personnes? Et si elles font des recherches sur des activités illégales dans certains États, telle que l’avortement?», s’est demandé Fowler.
OpenAI lui a répondu qu’elle divulgue les données des usagers uniquement lors de processus légaux «valides» ou dans le cas d’une «situation d’urgence». Mais s’il existe des portes dérobées dans ChatGPT, OpenAI n’a pas besoin de transférer ces informations pour qu’elles soient tout de même obtenues par d’autres institutions.
Sur ce sujet: Les chatbots nous surveillent | Revue de presse n°6
Le navigateur Atlas représente donc un recul supplémentaire de la vie privée sur internet. Un sacrifice que certaines personnes feront volontairement afin de pouvoir bénéficier de nouvelles fonctionnalités pendant qu’elles naviguent sur le web. En somme, on normalise et banalise le fait que nos activités en ligne sont de plus en plus surveillées et enregistrées.
Gardons à l’esprit que ce capitalisme de surveillance invasif est souvent mené par des entreprises ayant leur siège aux États-Unis, un pays qui avance à grande vitesse vers un modèle politique autoritaire et où la surveillance numérique est constamment renforcée, en particulier sur les réseaux sociaux.
ChatGPT’s Altas Browser is a Security Nightmare (Low Level)
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Amazon prévoit de remplacer 600’000 emplois par des robots
Dans une vidéo publiée jeudi, le commentateur politique Kyle Kulinski revient sur un article du New York Times qui révèle qu’Amazon compte remplacer plus de 600’000 emplois par des robots d’ici 2033 afin de faire des économies sur les salaires.
C’est une nouvelle inquiétante pour les travailleurs à travers le monde, qui auront de plus en plus de difficulté à trouver un travail à mesure que l’intelligence artificielle sera déployée dans de nombreux secteurs économiques.
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Pourquoi une IA surhumaine nous tuerait
Dans le nouvel épisode du podcast Modern Wisdom, Chris Williamson interviewe Eliezer Yudkowsky, un chercheur en intelligence artificielle et le fondateur du Machine Intelligence Research Institute.
Ils discutent du nouveau livre de Yudkowsky, If Anyone Builds It, Everyone Dies. Why Superhuman AI Would Kill Us All, co-écrit avec Nates Soares. Ils abordent en particulier les risques existentiels liés à la création d’une intelligence artificielle générale.
Écouter Modern Wisdom sur iHeart
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Bonne semaine et à dimanche prochain,
Arnaud





