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Les neurodroits contre la surveillance mentale
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Les neurodroits contre la surveillance mentale

Des spécialistes en neurotechnologies affirment qu'il faut rapidement instaurer des nouveaux droits humains pour protéger notre esprit des risques d'intrusions et de manipulations cérébrales.

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Arnaud Mittempergher
mai 11, 2025
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Image de Placidplace sur Pixabay

Dans mon premier article, j’expliquais que les neurotechnologies peuvent capter notre activité cérébrale et que l’intelligence artificielle peut analyser ces données pour décoder notre état de concentration, nos émotions et même le contenu de nos pensées. Une aubaine pour les entreprises technologiques qui prospèrent en captant les données de leurs utilisatrices et utilisateurs, notamment pour vendre de la publicité ciblée à des annonceurs. À l’ère du capitalisme de surveillance, nos données personnelles ont déjà une grande valeur mais nos données neuronales, très riches en informations sensibles, vaudront de l’or.

De nombreuses sociétés vont bientôt s’activer pour enregistrer un maximum de données cérébrales afin d’entraîner des systèmes d’intelligence artificielle, faire de la publicité ciblée, du neuromarketing ou pour les revendre à d’autres entreprises ou institutions. En parallèle de ces pratiques commerciales intrusives mais plus ou moins librement consenties, des armées, des milices, des groupes terroristes, des entreprises de surveillance et d’armement vont également utiliser des neurotechnologies pour avancer vers leurs objectifs.

Notre esprit est le dernier bastion de notre vie privée dans nos sociétés où la surveillance de masse devient de plus en plus omniprésente et invasive. Cet ultime rempart est maintenant fortement menacé.

Une technologie de plus en plus répandue

Le développement à grande vitesse des technologies de captation et de modification de l’activité cérébrale ouvre de nouvelles possibilités en médecine, par exemple pour assister des personnes paralysées ou aveugles. Mais les neurotechnologies ne seront pas utilisées uniquement à des fins thérapeutiques. Des appareils équipés de capteurs cérébraux sont déjà distribués aux employés de milliers d’entreprises à travers le monde (lire The Battle for Your Brain de Nita Farahany, pp.40-64) et même à des jeunes élèves afin de surveiller leur état de concentration.

Des capteurs cérébraux se trouvent également dans des écouteurs, par exemple les MN8 d’Emotiv et peut-être prochainement les Airpods d’Apple. L’entreprise californienne a en effet déposé un brevet pour pouvoir équiper ses écouteurs d’électrodes détectant les signaux électriques du cerveau.

Des capteurs cérébraux grand public sont aussi disponibles, par exemple pour faciliter la méditation, améliorer la qualité de son sommeil ou jouer à des jeux vidéo.

Les neurotechnologies sont également progressivement intégrées aux appareils de réalité étendue. Les casques de réalité virtuelle tel que le Vision Pro d’Apple sont déjà équipés de plusieurs capteurs biométriques. Le suivi du regard permet par exemple aux utilisatrices et utilisateurs d’interagir avec l’appareil grâce à leurs yeux. La multinationale ne souhaite pas s’arrêter là et a déposé un brevet afin de pouvoir utiliser cette fonctionnalité pour obtenir des informations sur l’état biologique des usagers, en particulier leur état d’attention mentale.

Il est très probable que la plupart des casques et lunettes de réalité étendue seront également équipés de capteurs cérébraux dans le futur, qu’ils soient disposés dans les écouteurs ou sur la tête des usagers.

Les risques liés aux neurotechnologies

Les neurotechnologies vont donc être progressivement intégrées à de nombreux appareils pour le grand public et impacteront ainsi la vie d’un grand nombre de personnes. Mais la liste des risques qu’elles représentent est longue:

  • Perte de la vie privée mentale

  • Surveillance de masse par des gouvernements et des acteurs privés (Lire le rapport des Nations Unies «Conséquences, apports potentiels et enjeux des neurotechnologies pour la promotion et la protection de tous les droits de l’homme», p.21)

  • Surveillance mentale au travail

  • Surveillance des dissidents politiques

  • Manipulation des pensées à des fins politiques

  • Police de la pensée

  • Interrogations forcées

  • Manipulation des mécanismes cérébraux qui sous-tendent les intentions, les émotions et les décisions des gens

  • Manipulation des perceptions et des souvenirs

  • Implantation d’images dans l’esprit

  • Risques pour l’intégrité mentale, la dignité humaine, l’identité personnelle, la liberté de penser et l’autonomie (Lire le rapport de l’Unesco «Unveiling the neurotechnology landscape», p.27)

  • Cyberattaques des implants cérébraux, avec diverses conséquences telles que le vol, la modification ou l’effacement des souvenirs, la détérioration de l’autonomie de la personne attaquée, l’émergence d’anxiété, de dépression ou d’autres problèmes de santé mentale (Lire le rapport de l’Unesco «Unveiling the neurotechnology landscape», p.27)

  • Discrimination par les compagnies d’assurance

  • Manipulation des consommateurs par des entreprises commerciales

  • Création d’armes pour altérer et désorienter le cerveau

  • Vente de nos données cérébrales à des tiers (Lire le rapport de la Neurorights Foundation «Safeguarding Brain Data: Assessing the Privacy Practices of Consumer Neurotechnology Companies», pp.51-57)

Un rapport des Nations Unies publié en août 2024 résume la situation actuelle en quelques lignes:

«Il existe une réelle possibilité que, dans les années à venir, des produits [issus des neurotechnologies] soient commercialisés à grande échelle alors qu’ils ne protègent pas assez leurs utilisateurs et que leurs risques pour les droits de l’homme ne sont pas clairement établis ou sont sous-estimés. Ces produits pourraient envahir la vie quotidienne car, dans la plupart des pays, les réglementations applicables sont peu claires, faibles ou inexistantes. Les grandes entreprises en quête de profits tireront certainement parti des vides réglementaires, du manque de connaissances spécialisées et de capacités techniques et de l’absence d’organes de contrôle appropriés. En l’absence des garde-fous nécessaires, le secteur risque de continuer à se développer sans entrave, en faisant prévaloir les questions de rentabilité et d’utilité avant les questions d’éthique et de droits de l’homme.»

- Rapport des Nations Unies «Conséquences, apports potentiels et enjeux des neurotechnologies pour la promotion et la protection de tous les droits de l’homme», p.5

Face à ces nombreux dangers, des chercheurs en neuroéthique et en neurobiologie se mobilisent pour protéger nos droits à l’aube de cette nouvelle ère des neurotechnologies.

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